Mais qui sont ces renouées asiatiques dont on entend souvent parler ? Que faire face à leur colonisation folle ? Naturalisée en Europe dans une grande diversité de milieux humides, les renouées asiatiques sont des plantes invasives aux capacités reproductives exceptionnelles et aux impacts majeurs sur la biodiversité, leur progression se faisant au détriment de la flore locale.

 Alors que l’on pourrait penser que tout a été dit et écrit sur ces fameuses renouées asiatiques, l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) a choisi de leur consacrer un numéro spécial dans sa revue Science Eaux et Territoires du mois de juin 2019.

Aquabio apporte sa contribution à travers différentes synthèses sur des travaux entamés depuis plusieurs années touchant à la gestion de ces plantes en bord de rivière :

  • une définition du stade invasif pour comprendre la progression des renouées et fixer des objectifs stratégiques de gestion ;

  • le déterrage précoce pour ralentir les fronts de colonisation ;

  • les traitements mécaniques pour traiter les terres envahies ;

  • les risques de dissémination de ces plantes via la filière de compostage.

 Découvrez ce numéro complet de Science Eaux et Territoires par ici !

Le site Système d’évaluation de l’état des eaux (SEEE)  est le nouvel outil d'évaluation de l’état des eaux de surface et des eaux souterraines. Il permet de calculer les différents indicateurs de qualité dont l’Indice Invertébrés Multi-Métrique I2M2 basé sur le compartiment invertébrés benthiques et qui remplace l’IBG-DCE (ou équivalent IBG) pour l’évaluation de l’état biologique des cours d’eau depuis l'arrêté du 27 juillet 2018.

Les peuplements de macro-invertébrés benthiques, qui colonisent la surface et les premiers centimètres des sédiments immergés de la rivière, intègrent dans leur structure toute modification, même temporaire, de leur environnement (perturbation, physico-chimique ou biologique d’origine naturelle ou anthropique).

L’I2M2 est sensible à 17 familles de pression en lien avec la qualité de l’eau (nutriments, micropolluants…) ou la dégradation des habitats (altération de la ripisylve, urbanisation…). Compatible avec les prescriptions de la Directive Cadre sur l'Eau, il prend en compte la typologie des cours d’eau, intègre le calcul d'un écart à un état de référence et est exprimé en EQR (Ecological quality ratio) de 1 (peuplement conforme à la référence) à 0 (peuplement complètement perturbé).

Il est constitué de métriques élémentaires intégrant la notion de polluo-sensibilité (ASPT), de traits fonctionnels (fréquences en taxons ovovivipares et polyvoltins) ou décrivant la richesse taxonomique ou la structure du peuplement (indice de diversité de Shannon).Ces métriques sont également exprimées en EQR (de 0 à 1). Chacune de ces métriques réagit à au moins 6 pressions différentes, ce qui permet à l’indice de réagir efficacement aux effets cocktail, mais qui peut rendre difficile l’identification des causes d’altération de l’état écologique.

Parallèlement à l’I2M2, un outil diagnostic, basé sur les traits biologiques, a donc été développé. Il permet une identification des pressions anthropiques les plus probables, présentées sous forme de deux diagrammes radar synthétisant les pressions probables sur la qualité de l’eau et l’habitat. Ces diagrammes ont un caractère informatif, les probabilités d’impact ne constituant pas des preuves irréfutables de l’effet significatif d'un type de pression.  Ils donnent des indications sur la probabilité qu'un type de pression soit susceptible d’avoir un effet significatif sur les communautés d'invertébrés aquatiques.

Lors de la validation de l’I2M2, il a été démontré que l’indice utilisé jusqu’à 2018 (IBG-DCE ou équivalent IBG) permettait de discriminer 65% des sites dégradés par les activités anthropiques, contre 82% pour l’I2M2 (Mondy et al., 2012).

Exemple



Les scores des métriques de l’I2M2 indiquent un milieu en état moyen 


L’outil diagnostic permet d’émettre des hypothèses quant à la nature et l’origine des perturbations. Elles peuvent ainsi s’expliquer par la présence de pesticides et de nitrates, combinés à une anthropisation du bassin versant et à des risques de colmatage.


Comme l'ensemble des outils basés sur les bio-indicateurs, ces éléments d'aide à l'analyse des peuplements et au diagnostic écologique ne peuvent remplacer l'expertise d’un hydroécologue.

Pour compléter les élèments du SEEE, nous vous proposons de nouvelles valeurs guides et des niveaux de confiance associés - ainsi qu'une explication synthétique des 2 outils - pour fiabiliser vos interprétations. Ces nouvelles valeurs guides sont issues d'une analyse statistique portant sur 15975 essais réalisés dans (presque) toute la France par AQUABIO, et peuvent être utilisées en attendant la prochaine version de l'outil diagnostic. 

Pour aller plus loin :

- Labat F., 2021. – Proposition de nouvelles valeurs guides provisoires et niveaux de confiance associés pour l’interprétation de l’outil diagnostique invertébrés. 

Usseglio-Polatera., Larras F. & Coulaud R., 2016. – Bioévaluation des cours d’eau peu profonds basée sur le compartiment des macroinvertébrés benthiques : I2M2 et outil diagnostique - Livret-Guide. LIEC CNRS UMR 7360, 57 p.

Mondy C. P., Villeneuve B., Archaimbault V. & Usseglio-Polatera P., 2012. – A new macroinvertebrate-based multimetric index (I2M2) to evaluate ecological quality of French wadeable streams fulfilling the WFD demands: A taxonomical and trait approach. Ecological Indicators18 : 452‑467 doi : 10.1016/j.ecolind.2011.12.013.

Mondy C. P. & Usseglio-Polatera P., 2013. – Using conditional tree forests and life history traits to assess specific risks of stream degradation under multiple pressure scenario. Science of The Total Environment461‑462 : 750‑760 doi : 10.1016/j.scitotenv.2013.05.072.

- Alric B., Dézerald O., Meyer A., Billoir E., Coulaud R., Larras F., Mondy C. P. & Usseglio-Polatera P., 2021. – How diatom-, invertebrate- and fish-based diagnostic tools can support the ecological assessment of rivers in a multi-pressure context: Temporal trends over the past two decades in France. Science of The Total Environment762 : 143915 doi : 10.1016/j.scitotenv.2020.143915.





Une exigence de la Directive Cadre Européenne

Une directive cadre européenne de 2008 (modifiée en 2013) établit des normes de qualité environnementale (NQE) pour la surveillance des polluants prioritaires dans les milieux aquatiques. Il s’agit de rechercher les polluants bioaccumulés dans les organismes aquatiques (poissons et invertébrés).

Deux approches peuvent être utilisées :

  • les approches passives s'appuient sur le prélèvement ou la collecte d’organismes autochtones sur la station de mesure. Elle permettent de vérifier la conformité des biotes prélevés vis-à-vis de NQE (Normes de Qualité Environnementales) applicables dans cette matrice et d’évaluer un risque envers les prédateurs supérieurs et/ou l’Homme par l’ingestion de proies/produits de la pêche contaminés

  • les approches actives reposent sur la transplantation, par encagement, d’organismes provenant d’une population source de référence. Elles permettent d’améliorer la comparabilité des résultats et de fiabiliser leur interprétation en termes de tendances.

La France a décidé de suivre les deux approches : collecte de chair de poisson pour l’approche passive, et encagement de gammares pour l’approche active.

Une méthode issue de la recherche

La méthode d’encagement de gammares est issue de 10 années de recherche d’IRSTEA. Elle est développée par la société BIOMAE (Spinoff du laboratoire d’écotoxicologie d’IRSTEA), et a fait l’objet de tests à grande échelle en partenariat avec Aquabio qui a pu apporter son expérience de terrain. La méthode, en cours de normalisation, prévoit plusieurs étapes :












Figure 1 : Du prélèvement des gammares jusqu’à l’exposition in situ dans les cours d’eau (Biomae)

  1. Prélèvement de gammares dans une station de référence ou une population source : BIOMAE possède une ancienne cressonnière dans laquelle il assure l’élevage d’une population homogène. Deux espèces peuvent être utilisées : Gammarus pulex et Gammarus fossarum.

  2. Stabulation et calibration en laboratoire. Les organismes sont maintenus pendant 7 jours dans des conditions contrôlées pour la température, la conductivité, l’oxygène, l’alimentation et photopériode. Puis une sélection des individus est opéré pour obtenir des mâles d’une taille et d’un poids homogène.

  3. Encagement pendant 21 jours dans le milieu. Les individus calibrés sont introduits dans des cages ajourées permettant les échanges avec le milieu, puis acheminés sur la station de mesure dans des conditions ambiantes contrôlées (température, oxygène dissous). Ils sont déposés dans une zone profonde et lotique, pendant 21 jours.
    A la fin de la durée d’exposition, ils sont réacheminés vers le laboratoire en les maintenant dans l’eau issue de la rivière.

  4. Conditionnement avant analyses. Au laboratoire, les individus morts ou moribonds sont comptabilisés et retirés. Les gammares survivants sont congelés et envoyés au laboratoire d’analyse pour recherche des contaminants métalliques et organiques.

    Les concentrations biodisponibles brutes des 250 molécules obtenues peuvent ensuite être interprétées en fonction du niveau de contamination par rapport à un référentiel Irstea / Biomae construit au niveau français ou du niveau de contamination par rapport aux NQE fixées par l’Union Européenne.

Une méthode aux applications multiples

Le même bioessai peut également être utilisé, au-delà de la DCE, pour évaluer la biotoxicité dans le cadre de suivi en milieu naturel : amont-aval rejet industriel , amont-aval déversoir d’orages, avant-après une interaction sur le milieu naturel (lâcher de barrage, travaux, etc.).
D'autres bioessais sont également pratiqués par Biomae pour évaluer le niveau de toxicité de l’ensemble des micropolluants présents dans le milieu récepteur par implémentation (alimentation, neurotoxicité, reprotoxicité et perturbation endocrine).


Conseil d'expert
La bioaccumulation est l'absorption de substances chimiques, présentes dans l'environnement, et leur concentration dans certains tissus par les organismes. La biodisponibilité désigne la fraction d'une substance ayant la possibilité d'être absorbée et d'être utilisée par le métabolisme d'un organisme vivant.
 

Pour aller plus loin...
- Téléchargez la Note technique du 26 décembre 2017 relative à la mise en œuvre du suivi des substances de l’état chimique des eaux de surface dans le biote dans le cadre de la directive cadre sur l’eau conformément à la directive 2013/39/UE du Parlement européen et du Conseil du 12 août 2013
- Site internet BIOMAE


Contacts
Laurent Viviani (Co-fondateur Biomae) - laurent.viviani@biomae.fr
Bruno Fontan (Directeur Technique d'Aquabio et membre commission AFNOR T95E Biosurveillance de l'environnement ) - bruno.fontan@aquabio-conseil.com



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